Sortir du transcendantal. Heidegger et sa lecture de Schelling

Sylvaine Gourdain

Paris, Ousia, 2018

 

L’auteur montre comment, dans les années 1930, Heidegger renverse puis abandonne définitivement toute approche transcendantale dans sa conception de l’être. Dans cette évolution, le cours de 1936 portant sur les Recherches philosophiques sur l’essence de la liberté humaine de F.W.J. Schelling constitue une étape décisive. Grâce à une étude minutieuse et approfondie de ce cours, l’auteur élucide la compréhension heideggerienne fine et précise de la conception du mal dans les Recherches. Si contribuer à l’avènement du bien implique de lutter contre le mal en nous engageant de toute notre existence dans le combat historique du bien contre le mal, cela suppose aussi de nous méfier de la force du Grund qui agit en nous, ce fond qui ne fonde pas, mais menace à tout instant de se révolter contre la réalité qu’il soutient. L’auteur met également en évidence certains échos importants – bien que souvent non avoués – de la lecture heideggerienne de Schelling dans d’autres textes des années 1930, notamment L’origine de l’œuvre d’art et Contributions à la philosophie. Les Contributions à la philosophie représentent pour Heidegger une tentative de renoncer au transcendantal tout en conservant une certaine forme de « possibilisation » qui incluerait en soi-même sa propre « impossibilisation ». Mais cette tentative, trop peu radicale, est finalement elle aussi abandonnée. Car il s’agit désormais de penser l’imprévisibilité de l’Ereignis, et Heidegger va pour cela s’appuyer sur certains concepts centraux comme la « fissuration » (Zerklüftung) ou la « différence » (Unterschied) entre l’être et le sans-être, qui succède à la « différence ontologique » (ontologische Differenz) entre l’être et l’étant.

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